J'avais envie de relire Un chant de Noël, un roman (court) de Charles Dickens. Publié et traduit en français chez Gallimard en 1966, ce récit est devenu culte en soi car il est repris chaque année dans les téléfilms de Noël. Avez-vous déjà vu un héros déplaisant qui va, la veille de Noël, être contraint de replonger dans son passé, de revivre des scènes présentes et de voir son futur ? Ce héros se rendra compte petit à petit de tout ce qu'il a perdu, des erreurs de son aigreur et de sa méchanceté. Il finira inévitablement (no spoil) par changer pour changer le cours de son histoire.
![]() |
Source de la photographie |
Publié dans la collection Folio Junior, ne vous y trompez pas ! Ne voilà pas un livre jeunesse, c'est un classique donc publié dans cette collection pour que les jeunes le lisent et l'étudient. Mais soyons francs, lire Charles Dickens n'est pas le plus simple. La construction des phrases est complexe et le vocabulaire riche. Il n'est pas toujours aisé de comprendre le propos, il faut être bien concentré. Soyez donc indulgents si un jeune ne rentre pas dedans et a du mal à s'y mettre. On est sur de la belle littérature classique.
L'avis de Charlotte
Le propos est triste puisque le héros grincheux Ebenezer Scrooge, plein de mauvais sentiments va être confronté à trois esprits : le passé, le présent et le futur. A la veille de Noël, le postulat est clair : sois tu ouvres les yeux et changes, sois tu finiras ta vie voué à te lamenter et souffrir.
Face à ce riche avare désagréable lui fait face son gentil neveu pauvre matériellement mais plein de richesses intérieures. Le propos est manichéen mais c'est ce que j'aime dans ce récit. Le point un peu négatif est que le propos ne tient pas vraiment debout, le héros met bien peu de temps à réaliser ses erreurs à vouloir changer mais cela tient de la taille du récit, particulièrement courte (146 pages en format poche).
Tel un conte, on va droit au but, la morale est claire, il n'y a pas à tergiverser. A lire à tous les âges. A relire quand on doute.
---
7/10
---
--- Extraits ---
Scrooge découvre le fantôme de son feu associé Jacob Marley qui le met en garde.
p.42
"- Oh ! captif, lié, chargé de doubles chaînes, s'écria le Fantôme, pour ne pas savoir qu'il doit s'écouler dans l'éternité des siècles d'incessant labeur accompli pour cette terre par d'immortelles créatures avant que les bienfaisants effets ne s'en fassent sentir ! Pour ne pas savoir qu'une âme chrétienne, oeuvrant avec bonté dans sa petite sphère, quelle que soit cette sphère, trouvera sa vie terrestre trop courte pour les innombrables moyens qu'elle a de s'employer. Pour ne pas savoir qu'une éternité de regrets ne peut réparer les possibilités négligées d'une seule vie ! Et j'étais ainsi ! Oh ! j'étais ainsi !
- Mais, Jacob, tu as toujours été un excellent homme d'affaires, dit d'une voix brisée Scrooge qui commençait à s'appliquer toutes ces condamnations à lui-même.
- Les affaires ! s'écria le Fantôme, se tordant les mains de nouveau. L'humanité était mon affaire. Le bien commun était mon affaire ; la charité, la compassion, la tolérance et la bonté, telles étaient mes affaires. Les opérations de mon commerce n'étaient qu'une goutte d'eau dans l'immense océan de mes affaires.
Il tenait sa chaîne à bout de bras et l'on eût dit qu'il voyait en elle la cause de toutes ses stériles douleurs ; puis il en frappa lourdement le sol à nouveau.
- Au cours de l'année qui se déroule, repris le Fantôme, c'est à cette époque-ci que je souffre le plus. Pourquoi ai-je jadis traversé la foule de mes semblables, les yeux baissés vers la terre, sans les lever jamais pour contempler l'Etoile bénie qui conduisit les Rois vers une humble demeure ? N'y avait-il pas autour de moi de pauvres foyers où sa lumière eût pu me mener ?
Scrooge était très inquiet d'entendre le Fantôme discourir avec véhémence et il se mit à trembler de tous ses membres."
Scrooge observe le Noël qui se déroule chez une pauvre famille
p.94
"Il n'y avait là rien de très élégant. Les gens de cette famille n'étaient pas beaux, il n'étaient pas bien habillés, leurs chaussures avaient depuis longtemps cessé d'être imperméables, leurs vêtements étaient minables et Peter connaissait bien, j'en jurerais, la boutique du prêteur sur gages. Pourtant, ils étaient heureux de vivre et pleins de gratitude, satisfaits les uns des autres et de la fête qu'ils célébraient. Et lorsqu'ils s'effacèrent peu à peu au regard, l'air encore plus ravis à la lueur des brillantes étincelles dont l'Esprit les aspergea en partant, Scrooge tint les yeux fixés sur eux, surtout sur Tiny Tim, jusqu'à ce qu'ils eussent complètement disparu."