*** 8/10 *** Le Réseau Pourpre - Carmen Mola

Ames sensibles, s'abstenir ! 

Excellent thriller publié chez Actes Sud en 2021 pour la version française.

Il s'agit de la deuxième enquête du BAC (voir La Fiancée gitane, 2019). L'inspectrice Blanco va partir à la recherche d'un réseau ultra-violent sévissant sur le dark web et organisant des évènements ultra violents, appelés snuff movies. Concrètement, ils vendent des liens très chers sur des forums pour regarder en direct des atrocités (je ne vous spoile pas le spectacle!). Il s'agit donc du Réseau Pourpre, après lequel les inspecteurs de la brigade- Orduno, Zarate, Chesca et Buendia- vont courir.

Ultra violent de part le sujet, le suspens sera à son comble lorsque Elena Blanco va comprendre que sa vie privée est intimement liée à cette enquête. Les limites entre vendetta personnelle et responsabilité professionnelle vont peu à peu disparaître. Parfaitement écrit, le scénario est impeccable et les chapitres sont passionnants, on a envie de le lire d'une traite !


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L'avis de Charlotte

L'auteure Carmen Mola est présentée en quatrième de couverture comme une "mystérieuse Madrilène qui serait mariée et mère de trois enfants". Pourtant, en octobre 2021, la véritable identité des auteurs est dévoilée lors d'une remise de prix : le Prix Planeta dont la valeur atteint 1 million d'euros. Derrière cette identité féminine, que des hommes, trois :  Jorge Díaz, Agustín Martínez et Antonio Mercero. Ils seraient scénaristes pour des émissions espagnoles et auteurs. La supercherie n'a pas été démasquée avant  puisqu'ils prenaient soin de ne pas donner d'interview.

Question d'identité

L'utilisation d'un pseudonyme féminin par des hommes n'est pas passé inaperçu et n'est pas du goût de tout le monde. Les auteurs ont démenti l'utilisation d'un nom féminin au niveau du marketing, selon eux, cela n'aurait pas d'impact sur les ventes. Antonio Mercera a notamment déclaré "Nous ne nous sommes pas cachés derrière une femme, nous nous sommes cachés derrière un nom."

Ce qui peut déranger peut être le fait que les femmes ont été sous-représentées durant des années (disons le clairement, elles sont moins payées que les hommes) et qu'elles doivent toujours se battre pour ne pas être restreintes dans leur art. Le fait que des hommes s'octroient un nom féminin peut apparaitre quelque peu ironique, surtout lorsqu'on sait que la majorité des livres publiés sont écrits par des femmes. 

Le profil marketing

Il est toutefois intéressant de noter que les femmes achètent plus de livres que les hommes. Selon une étude du Centre National du Livre (2021), tout âge confondu, 85% des femmes se déclarent lecteurs contre 77% des hommes. En 2021, 83% des femmes ont acheté des livres pour offrir contre 72% des hommes et 78% des femmes en ont acheté pour elles-mêmes contre 72% des hommes. 

Mais devons-nous pour autant en déduire qu'une femme aurait plus tendance à acheter un roman écrit par une femme ? N'oublions pas que l'on parle d'un polar très violent et pas d'un roman à l'eau de rose. En toute franchise, lorsque j'ai débuté la lecture, je me suis arrêtée, ai retourné le livre pour relire ce que j'avais lu sur l'auteure (une professeur de maths, maman de trois enfants) et j'ai été épatée, je me suis fait la réflexion "une femme qui écrit des scènes ultra violentes, avec des enfants, ça c'est impressionnant". Donc forcément, lorsque j'ai découvert le subterfuge, je me suis sentie quelque peu dupée. Mais femme ou homme, ce livre a tout à fait sa place dans une librairie !

Je pense que ces questions méritent d'être posées. Mais faut-il pour autant crier au scandale ? Je ne sais pas, ce que je sais, c'est que ces trois auteurs méritent amplement leur prix et que le livre est excellent. 

Cela n'empêche que le sexe n'influe pas sur l'écriture, je n'y crois pas, tout est dépendant du caractère de l'auteur, son histoire, ses compétences, son style, son dada. Stephen King aurait-il pu être une femme ? Oui je le pense.

Mais au final, la vraie question ne devrait-elle pas être : l'œuvre collective est-elle plus puissante que l'œuvre individuelle ? 

Il est certain que la puissance du récit vient de la combinaison de ces trois esprits.  

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8/10

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